Pour tout vous dire, je ne saurais pas par où commencer. Je pense que mieux vaudrait encore reprendre l'ordre chronologique des évènements. Mon histoire commence au pied de l'Acropole, pas si loin d'ici. C'était déjà une prédisposition diront certains, mais c'était bien le hasard qui m'avait mené à grandir à Athènes dès ma plus tendre enfance.

Mon père, James Grayson, était un diplomate américain qui travaillait à l'ambassade d'Athènes depuis des années. Il avait rencontré ma mère, Eleni des années auparavant, alors qu'il faisait encore ses études à Harvard. Elle était dans l'équipe d'escrime, elle avait un accent chantant, et il était un petit nerd qui passait inaperçu. Les deux étaient tombés amoureux, et malgré leurs vies si différentes, ils avaient fini par se marier et réussir à conjuguer leurs deux vies, celle d'un jeune diplomate et d'une jeune athlète olympique au futur prometteur.
Pendant des années, ma mère suivit mon père et ses mutations aux quatre coins de la terre. Jusqu'à ce que je débarque dans leurs vies. Ma mère voulait se rapprocher de sa famille en Grèce, et mettre un terme à sa carrière qui lui demandait trop d'investissement à présent. Mon père aurait fait n'importe quoi pour elle. Il fallut attendre quelques années avant qu'il n'obtienne sa mutation, mais trois ans plus tard, nous déménagions de New York à Athènes.

C'est donc là bas que j'ai grandit, entre une mère qui avait finit par abandonner le très haut niveau pour s'occuper de devenir à son tour entraîneur et mon père qui travaillait dur à l'ambassade. Entre la salle d'entraînement et les soirées mondaines de l'ambassade. Pour être tout à fait honnête, j'ai plutôt été élevé à la grecque que comme un fils de diplomate américain. D'ailleurs, en dehors de la maison, personne ne m'appelait Jayden. Seuls mes parents et mes amis de l'école du consulat m'appelaient Jayden ou Jay. Pour le reste d'Athènes qui ne réussissait pas à prononcer mon nom, j'étais γλαύκινος, "glaukinos". Bleu-gris, comme mes yeux. Et rapidement, j'étais Kinos plus que Jayden. Même mes grands parents maternels adoptèrent le surnom, comme toute la famille. Cela m'allait totalement. Et puis, il y avait Iason, mon cousin, qui m'appelait Adelphos, frère. Iason avec qui j'étais tout le temps à préparer des coups, à me servir de lui pour draguer les filles. A prendre soin de lui aussi.
J'ai eu l'impression de mener deux vies, celle que l'on attendait de moi, celle que mon père attendait de moi, et celle qui m'appelait. Celle de la rue, des bagarres parfois, mais surtout des amitiés éternelles que l'on noue après un coup foireux aux gamins du quartier d'à côté. Toujours fourré dehors, ou bien au dojo où ma mère donnait des cours au rez de chaussée. Je me suis rapidement pris au jeu, et mit à l'escrime avec ma mère, et aux arts martiaux avec Tsume au dessus. Cela ne plaisait pas à mon père, sans que je sache pourquoi, ce qui me donnait une raison supplémentaire de m'amuser à continuer. J'étais doué, et finalement, il finit par l'accepter, bien qu'au fond, il ne cessait de répéter que ce n'était pas la place d'un jeune garçon d'apprendre à se battre et de vouloir se battre, surtout.

Je ne compris que bien plus tard pourquoi il aimait si peu me voir combattre et m'entraîner. J'avais 17 ans quand mon monde a changé. J'avais 17 ans lorsque j'ai comprit pourquoi ce tel déséquilibre en moi, pourquoi je ne trouvais pas réellement ma place. Pourquoi je ne pouvais suivre le chemin qu'on m'avait tracé.
C'est à 17 ans que j'appris que mes parents, ceux qui m'avaient élevé, n'étaient pas mes parents biologiques. Que mon père biologique était le frère de mon père d'adoption. Et que s'il n'avait pu m'élever lui même, ce n'était pas parce qu'il ne m'avait pas désiré, mais parce qu'il n'avait pas eu le choix. Mon existence avait du être tenue secrète pour ne pas mettre en danger la vie de mes deux parents, et ma mère particulièrement. Je l'appris alors que mes parents venaient de recevoir une lettre de mon véritable père qui désirait pouvoir me rencontrer pour la première fois depuis le jour où il m'avait remis à son frère.
Et quelques jours plus tard, il était là. La ressemblance avec mon père adoptif avait toujours été suffisante pour que je ne me pose jamais de question, mais j'étais le portrait parfait de mon père biologique.

C'est alors que ma vie changea radicalement, et profondément. J'en apprit plus sur mes origines, mais surtout sur l'identité de mes parents. Mon père, Wayne Grayson, était un chevalier d'Athéna, le chevalier d'Or de la Balance. Ma mère quand à elle était une des protectrices d'Asgard que mon père avait rencontré alors que ma mère était venue au Sanctuaire pour une mission diplomatique. Mais leur amour ne pouvait pas durer, ma mère devait repartir à Asgard, et l'un comme l'autre ne pouvaient abandonner leurs vies et leurs camps, sans compter que la famille de ma mère n'accepta pas qu'une grande guerrière comme elle ne se marrie pas à un asgardien. Ma mère était tombée enceinte, mais ne pouvait élever un enfant sans qu'il ne soit en danger ou rejeté. Mon père réussit à la convaincre d'achever la grossesse, après quoi elle n'aurait plus à se soucier de moi. Ma naissance se passa dans le plus grand secret, la grossesse de ma mère avait pu être cachée à sa famille un peu avant que sa mission diplomatique ne soit interrompue. Elle partit peu de temps après, laissant à mon père le nourrisson que j'étais. Il ne pouvait pas m'élever quand ses missions requéraient qu'il parte indéfiniment, alors qu'il était si jeune aussi, et seul, mais il ne voulait pas m'abandonner. Il voulait être su que l'on s'occupe bien de moi. Il voulait avoir une chance de pouvoir un jour retrouver un fils. Il décida alors de me confier à son frère et à sa belle-soeur qui désiraient un enfant et m'élevèrent comme tel.
Pourquoi était-il revenu à ce moment précis, je l'ignorais, et qui était exactement ma mère, vivait-elle toujours, c'est un secret qu'il emporta dans sa tombe.

Et ce jour là, mon père se tenait devant moi, bien décidé à se faire une place dans ma vie si je le désirais aussi. Je compris alors pourquoi j'étais différent. Je n'étais pas destiné forcément à être moi aussi un chevalier d'Athéna, mais je devais avoir quelque chose dans le sang, une envie de combat, une envie de plus. Et un besoin : savoir qui j'étais. Etre en paix et me trouver enfin entre celui que j'avais été en grandissant, celui qu'on aurait voulu que je sois, celui que je me destinais à être qui ne pouvait être que le parfait équilibre entre ces natures qui me tiraillaient.

Ce ne fut pas sans regret que je décidais de suivre mon père, et d'abandonner la famille qui m'avait élevé. Nous n'avons d'ailleurs jamais réellement perdu contact, il m'arrivait même souvent de revenir en Grèce les voir pendant que mon père partait en mission pour le Sanctuaire. Ils savaient qu'ils ne m'auraient que pour un temps, et celui-ci était arrivé à terme. Je partais sur des chemins que je n'aurais jamais imaginé emprunter. Je ne savais pas ce que ma vie allait être, mais je voulais en savoir plus sur là d'où je venais.

Mon père résidait la plupart du temps dans un endroit reculé, appelé les Cinq Pics. C'est là que je le suivis. Il ne vivait pas au Sanctuaire, pas encore, sa présence n'y était pas nécessaire. Il veillait sur ce lieu sacré, et entraînait de temps en temps quelques disciples dont beaucoup finissaient par abandonner. C'est là que devait débuter mon entraînement. Pendant plus de 5 ans je m'entrainais avec lui. Il m'apprit la grandeur de sa tâche et de son rôle, celui de transmettre à une génération future et sa raison d'être, protéger Athéna. Il nous racontait les histoires qui se transmettaient de chevalier en chevaliers, narrant les guerres saintes et les conflits qui l'opposèrent aux autres Dieux de l'Olympe ou d'ailleurs. Mon monde devenait plus grand, plus terrible, et mon existence même s'en faisait bien plus petite. Ces cinq années me permirent de découvrir réellement qui j'étais, et ce que je voulais faire. Je ne savais pas si j'avais les épaules suffisamment solides, mais je savais que je voulais à mon tour devenir un protecteur d'Athéna, et faire de ce monde, un monde meilleur. J'avais trouvé qui j'étais. J'avais réussi à trouver l'équilibre après lequel j'avais couru toute ma vie. Au pied de la cascade de Rozan, je trouvais enfin la sérénité et l'équilibre.

Cela faisait alors plusieurs semaines que mon père demeurait alité. J'avais fini par apprendre que s'il était venu me chercher c'était aussi parce qu'il avait apprit que le cancer contre lequel il s'était battu depuis des années était de retour, et qu'il pressentait que cette fois, il ne remporterait pas le combat.
J'avais 22 ans, j'avais trouvé ma voie mais perdu celui qui m'y guidait. Son armure restait silencieuse, elle qui n'avait été portée depuis des années, et mon coeur empli de trop de peine pour pouvoir l'entendre. J'avais trouvé l'équilibre, oui, maintenant il me fallait le garder, et continuer seul sur ma voie.
Pendant plusieurs mois, trois ans pour être exact, je continuais seul ma route. Je quittais les cinq pics, et me mit à errer de par le monde, à chercher l'équilibre en moi et autour de moi. J'appris auprès de nouveaux maîtres, je vis le monde d'un oeil nouveau. Je me sentais différent, plus apte à comprendre. L'ouragan instable qu'avait été ma jeunesse et dans lequel j'étais retombé à la mort de mon père s'apaisait.
Je compris que l'heure était venue pour moi d'accepter mon héritage. L'armure de mon père m'attendait.

Depuis, je parcours le monde au service d'Athéna, ou plutôt du Sanctuaire. Malgré mes liens avec les Cinq Pics et la Cascade de Rozan, je n'y passe plus autant de temps qu'avant. Toujours de par le monde, mon côté diplomate m'amène à voyager et à me rendre souvent en ambassade, mais l'une de mes missions principales reste la localisation d'Athéna. Et je dois bien dire que je suis fier d'être au service d'Athéna, et honoré de pouvoir me battre pour elle.