Chapitre 1 : Une enfance dans l’ombre
Agnès naquit dans une petite ville de la côte de granit, en Bretagne, durant l’hiver 1992. Malheureusement pour elle, elle était ce qu’on appellerait une enfant non désirée. Fille du Duc de Montfort, une famille de la vieille noblesse bretonne, et d’une jeune femme aventureuse du nom de Michelle Sorel. Une femme sans beaucoup de scrupules qui trouvait la fortune du Duc bien plus intéressante que le Duc lui-même. Sachant pertinemment qu’elle ne parviendrait pas à l’épouser, elle se dit qu’un enfant serait le bon plan pour soutirer quelques billets au noble. Sitôt pensé, le plan fut mis en application et, neuf mois plus tard, la petite Agnès vit le jour.
La famille de Montfort vivait selon un code assez ancien de la noblesse. Par conséquent, le Duc reconnu l’enfant mais ne tenait pas franchement à s’encombrer de sa mère. Une mère qui laissa au père tout le plaisir de la paternité contre un chèque avec plusieurs zéro dessus. Michelle disparut dans la nature sans demander son reste et sans se préoccuper le moins du monde de cette enfant. La gamine partait déjà avec un certain handicap. Mais ce handicap ne fit que s’amplifier avec le temps car si son père avait bien accepté de s’en occuper, c’était plus à cause des convenances que par véritable amour paternel. Il ramena l’enfant dans le manoir séculaire et la laissa aux bons soins d’une nourrice. Le bébé grandit seul mais avait quand même le droit à un peu de chaleur et d’attention grâce à sa nourrice. Du moins, jusqu’à l’âge de trois ans où son père considéra qu’elle n’en avait plus besoin et qu’elle devrait se débrouiller seule. La fillette fut donc livrée à elle-même, abandonnée dans un manoir sans vie où même les domestiques n’en avaient pas grand-chose à faire d’elle.
Le temps passait et le Duc de Montfort détestait de plus en plus la gamine dont il avait du s’encombrer. Par le biais d’une mauvaise conjoncture économique, les affaires de ce dernier périclitaient et il commença à boire. Inutile de dire que dans un tel état, il avait besoin d’un bouc émissaire sur lequel passer ses nerfs. Et le malheureux bouc-émissaire fut sa propre fille, un fardeau dont il se serait bien passé. Agnès n’était responsable de rien, pourtant c’est elle qui subit le courroux de son père. L’homme se révéla particulièrement violent en ayant bu et n’hésitait pas à frapper la gamine. Après de multiples séances de coups, Agnès développa son aptitude à se cacher. Dès que son père était dans le manoir, elle cherchait tous les coins et recoins où elle pouvait se dissimuler, passer inaperçue. Malheureusement, ça ne marchait pas à tous les coups et alors son père se montrait deux fois plus violent. La gamine se retrouvait souvent bleu de la tête aux pieds ou pas loin. Cependant plus elle grandissait, plus elle arrivait à se dissimuler et à se montrer plus silencieuse qu’un chat mais plus la haine de son père à son encontre augmentait. Il ne se gênait pas pour lui conter l’attitude de sa mère et bien lui faire comprendre qu’il n’avait jamais voulu d’elle et qu’elle n’était rien de plus qu’une batarde.
La vie n’étant pas des plus simples, la jeune Agnès se réfugiait dans les livres et dans son monde. Pour fuir l’horreur de son quotidien, elle se cachait dans un petit coin, fermait les yeux et s’inventait un monde à elle, un monde de princesses et de chevaliers, de dragons et de licornes, de sirènes et de fées. C’était dans ses élucubrations oniriques qu’elle trouvait un certain réconfort et une liberté qu’elle ne trouvait pas ailleurs. Avec les années, elle vivait plus dans sa tête que dans la vie réelle.
Quand elle eut neuf ans les choses se précipitèrent. Une énième crise économique mondiale eut raison de la fortune et de la raison du Duc de Montfort. Il perdit tout. Presque du jour au lendemain, au travers de placements hasardeux en bourse, la fortune des Montfort fondit comme neige au soleil. Le soir même de cette hécatombe financière, le Duc se mit à boire plus que de raison. Plus il buvait, plus il déprimait, plus il rendait responsable sa fille de son échec. Ne supportant pas d’avoir tout perdu, de devoir vendre le manoir de famille, il décida que la vie ne valait plus la peine d’être vécue mais il voulait que sa fille sache que tout était de sa faute. Il alla la chercher et la ramena dans son bureau où pendant plusieurs heures, il lui dit à quel point, elle était idiote et responsable de tous ses malheurs. Pendant tout ce temps, il avait pris une arme, un revolver, qu’il triturait nerveusement et qu’il pointait de temps à autre sur sa fille. La gamine, morte de peur, pleurait à chaudes larmes et s’était recroquevillée sur elle. Quand son père eut déversé tout son venin, il se posta devant elle, un sourire mauvais aux lèvres.
« Tu vois, c’est de ta faute. Toute ta vie, tu devras te rappeler ça ! »
Et sans un mot de plus, il se tira une balle en pleine tête et s’écroula aux pieds de sa fille. La fillette resta là, sans bouger, complètement choquée par la scène et, de nouveau, se réfugia dans son monde où ses horreurs n’existaient pas. Le matin, elle fut retrouvée devant le corps de son père, complètement prostrée et les yeux perdus dans le vague.
Chapitre 2 : D’un monde à l’autre
Agnès fut placée en orphelinat, le temps que sa mère soit retrouvée vu que le duc n’avait plus de famille. La gamine resta là pendant près d’un an. Une année durant laquelle, elle ne prononça pas un mot. Pour tous, cela était dû au choc de la mort de son père. Les psychologues jugeaient l’enfant fortement traumatisée au point qu’elle en avait perdu la parole. Au bout de quelques semaines à essayer de la faire parler, les médecins et éducateurs abandonnèrent la partie, laissant la petite reprendre ses marques. Ils devaient se dire qu’elle parlerait quand elle se sentirait prête.
La petite fille vécue dans cet endroit remplis de bruit et d’enfants de tous les âges pendant plusieurs mois. Comme souvent, elle se mettait dans un coin et se perdait dans son esprit. Résultat, les autres gosses se moquaient d’elle et la considéraient soit comme bizarre, soit comme mentalement attardée. Les mioches n’étant pas tendres, c’était plutôt la deuxième hypothèse qu’ils retenaient mais peu importait pour la fillette qui faisait abstraction de tout ça. Quand les autres enfants devenaient trop durs avec elle en parole et en acte, elle quittait le centre en douce pour se rendre à la plage. Elle s’était trouvé un petit coin, difficile d’accès et battu par les vents, où elle était toujours seule et tranquille. Elle perdait son regard dans les vagues et s’enfuyait dans son petit monde à elle comme toujours.
Les jours s’écoulaient ainsi, dans la monotonie et l’indifférence la plus totale. Au bout de plusieurs mois, un beau jour de printemps qui en fait n’était pas si beau que ça vu que la tempête se déchaînait. La gamine était pourtant toujours sur la plage et ne faisait cas ni de la pluie, ni du vent, ni des trombes d’eau salée que lui envoyait la mer. Elle restait là, toute trempée, les yeux perdus dans le vague. Ce n’était pas la première fois que cela lui arrivait. Elle en avait l’habitude. Les côtes bretonnes sont assez réputées pour leurs pluies et tempêtes. Ce jour-là, les heures passaient sans qu’Agnès ne bouge le moindre membre. Elle restait aussi immobile qu’une statue. Quand un homme arriva par le côté de la plage. Cela était surprenant car jamais personne ne venait jamais par là pour autant l’enfant ne réagit pas. Elle avait bien vu le nouveau venu mais elle n’en faisait pas cas. Le considérait-elle comme une émanation de son esprit ? C’était une possibilité mais elle ne dit pas un mot. L’homme s’approcha et vint s’asseoir près d’elle. L’enfant ne dit toujours rien, ne faisant aucun geste, ne manifestant aucune crainte. Elle restait juste là, immobile. L’homme resta près d’elle, sans bouger non plus. Deux heures environ passèrent ainsi sans qu’aucun des deux ne bougent. Finalement, c’est le nouveau venu qui prit la parole.
« Bonjour jeune fille. Ta capacité à ne pas bouger et ne pas avoir peur est impressionnante ! Comment t’appelles-tu ? »
Le silence fut sa seule réponse ce qui étonna d’autant plus l’homme. Perplexe, il se présenta alors.
« Moi, je me nomme Jonas. Je viens d'une île par delà la mer. »
Il montra l’océan qui s’étendait devant eux. Mais Agnès ne réagissait toujours pas continuant de déstabiliser son compagnon. Il passa sa main devant ses yeux, avant de faire claquer ses doigts au niveau de ses oreilles. Il devait croire qu’elle était peut-être sourde et aveugle vu qu’elle ne répondait à aucuns stimuli particuliers. Il soupira.
« Je me suis peut-être trompée. Si t’es sourde, muette et aveugle, tu n’as donc aucun mérite à rester sans bouger. Autant pour moi. Je vais y aller. »
Jonas semblait dépité. D’habitude, il était plutôt doué pour juger les gens et surtout ceux qu’ils sentaient apte à venir servir la déesse Athéna. Là, visiblement, il s’était planté en beauté. Il aurait l’air malin devant les autres chevaliers. Lui qui observait la gamine depuis quelques temps. Il avait raconté qu’il sentait un grand potentiel chez elle. Et ben maintenant, il allait avoir l’air fin et serait la cible des quolibets. Il haussa les épaules. Il ferait avec. Il commençait déjà à s'en aller quand une petite voix se fit entendre.
« Agnès. »
L’homme se retourna brusquement en entendant ce mot. La gamine n’avait pas bougé mais il était certain que c’était bien elle qui avait parlé et que c’était son prénom qu’elle venait de lui donner. Jonas sourit. Non, il ne s’était pas trompé. Elle avait un potentiel exceptionnel à n’en pas douter. Il lui sourit. Il savait à présent qu’elle avait bien tous ses sens. L’homme revint donc vers elle et s’agenouilla devant elle.
« Ainsi tu parles bien et tu entends tout aussi bien. Agnès c’est un joli prénom. Pourquoi ne pas m’avoir parlé avant ? »
L’enfant releva alors la tête vers lui et le regarda vraiment pour la première fois. Le chevalier fut surpris de voir sa totale inexpression.
« Je n’en voyais pas l’utilité. »
Réponse, simple, concise et sommaire. Visiblement, parler n’était pas son point fort mais Jonas ne lui en tenait pas rigueur. Chacun avait son caractère et sa façon d’être après tout. Il se dit qu’il fallait lui expliquer les choses mais ne pas trop attendre en retour.
« Ecoute-moi bien Agnès. Je viens d'un lieu qu'on appelle le Sanctuaire. Je suis ce qu’on appelle un chevalier. Je ne pense pas que ça te dise grand-chose mais bon. Si tu viens avec moi, je t’apprendrai comment avoir une force plus grande que la normale. Tu deviendras un des serviteurs de la déesse Athéna. Je ne sais pas pourquoi tu parles si peu mais je me doute que tu as du vivre un drame. Peut-être qu’en changeant totalement de vie, tu pourras dépasser tes doutes et tes peurs. »
L’homme se releva et avança de nouveau vers la plage. Il se retourna et lui tendit la main.
« Si ça te tente, viens avec moi. »
Il n’espérait pas de réponse mais bien un geste. Il montrait par là qu’il ne cherchait pas à la faire parler à tout pris. Il acceptait sa façon d’être. Devant cette nouvelle vie qui s’offrait à elle, Agnès se releva et prit la main tendue. Sans aucun remord, elle quitta son monde pour aller en affronter un autre.
Chapitre 3 : D’Andromède au Styx
Jonas l’amena dans un premier temps au Sanctuaire. Le chevalier lui fit découvrir les lieux et lui expliqua les tenants et les aboutissants des choses. Il prit son temps et passa trois jours à faire le tour de tout aussi bien les lieux, les gens que les idées et les concepts. La fillette écoutait tout mais ne disait toujours rien ou le strict nécessaire. Certains chevaliers et apprentis la regardaient un peu bizarrement mais aucun ne se permit de la juger inapte à devenir chevalier. Jonas avait sa petite réputation et débusquait toujours des perles. Après ces trois jours, il questionna de nouveau l’enfant pour savoir si elle tenait à intégrer les rangs de la chevalerie. La fillette acquiesça. Elle n’en donna pas ses raisons et l'homme ne chercha pas à les connaître. Si un jour elle voudrait en parler, elle le ferait. Jonas la conduisit jusqu’au baraquement des apprentis et lui donna une tenue. L’entraînement pouvait à présent commencer.
C’est Jonas lui-même qui décida de l’entraîner. Il programma son entraînement de manière à d’abord renforcer son physique. La petite était… petite et frêle. Alors, certes les muscles ne faisaient pas tout mais elle devait quand même se renforcer un brin. Pendant des semaines, des mois, elle fit tous les exercices possibles et imaginables pour développer sa musculature, sa force, son endurance, sa rapidité, sa souplesse. Agnès endurait tout sans se plaindre, elle s’accrochait malgré la dureté de cet entraînement. Pour Jonas, qu’elle soit une fille ne changeait rien. Elle devait s’entraîner sans relâche pour arriver à égaler les hommes et avoir une certaine crédibilité. Le sanctuaire d'Athéna ne faisait pas exception à la règle. Le nombre de femmes y était peu important et elles étaient souvent mal vues. Celles qui parvenaient à obtenir du respect, étaient celles qui parvenaient à supplanter les hommes. Jonas le savait bien et tenait à ce que sa protégée obtienne la place qui lui était due.
Une fois, le physique renforcé, il passa à une autre étape, la découverte du cosmos. Il fallait y aller par étape. Pour cela, il décida de quitter le Sanctuaire. Il avait déjà sa petite idée concernant l'armure qui pourrait convenir à la demoiselle. Il la mena dons sur une île au large de l’Éthiopie, l’île d'Andromède. L'amure qui y sommeillait pourrait fort bien lui correspondre. Arrivée en ce nouveau lieu, elle fut mal reçue par les apprenties déjà présents. Eux s’entraînaient pour cette armure depuis un bon moment déjà alors voir une fille débarquée comme ça ne leur plaisait pas de trop. Elle fut rapidement laissée de côté mais cela ne la gênait pas vraiment. Elle poursuivit simplement son entraînement et se concentra sur la nouvelle étape, découvrir son cosmos.
Il était clair que la gamine ne pourrait pas révéler son cosmos du jour au lendemain, il ne fallait pas pousser même si son maître la trouvait particulièrement douée et précoce. Prenant son temps, il lui expliqua alors ce qu’était le cosmos et comment elle pouvait y faire appel. Cependant, il ne poussa pas trop loin. Après tout, c’était à chacun de trouver comment faire jaillir une telle force de soi-même. Bizarrement, sa puissance se révéla bien plus rapidement que son maître ne l’aurait imaginé. Le fait qu’elle passe énormément de temps seule, presque en méditation, lui permit de trouver les prémices de son cosmos. Bien vite, il se révéla totalement. Jonas passa alors à l’étape suivante et lui apprit des attaques de base.
Les mois passaient et Agnès gagnait en force et en puissance. Elle commençait à se faire sérieusement remarquer mais elle ne se liait toujours à personne. Elle fuyait même les gens préférant toujours sa solitude. Jonas avait espéré qu’avec le temps, elle s’ouvre un peu plus mais en six ans ce ne fut jamais le cas. Pire, il avait l’impression qu’elle se refermait de plus en plus sur elle. Néanmoins, il n’insistait pas, craignant d’empirer les choses. Il la laissait seule, se disant qu’au fond, elle était peut-être plus heureuse comme ça.
Le plus clair de son temps libre, elle le passait à regarder la mer. Cela semblait lui apporter la paix et la sérénité. C'était d'ailleurs devant celle-ci que son cosmos s'était éveillé. Un jour, en pleine méditation, elle fut attirée par des petits cris. Surprise la jeune fille se releva. Ce n'était pas des cris humain. Elle regarda par delà les rochers et vit un animal sur la plage. Intriguée, bien que conservant son regard froid, elle descendit jusqu'à l'endroit où semblait se débattre l'animal. En arrivant près de lui, elle découvrit qu'il s'agissait d'un dauphin. Un dauphin blessé. Un harpon s'était fiché dans son flanc. Pauvre bête. Les hommes étaient vraiment des cons pour s'attaquer à un tel animal. Si ça avait été un être humain, Agnès l'aurait purement et simplement éliminé, histoire d'abréger ses souffrances mais là elle prit le temps d'examiner l'animal, se servant de son cosmos pour l'apaiser. La blessure était profonde mais pas mortel pour autant. Si le harpon était correctement retiré, le dauphin pourrait s'en sortir. Faisant très attention à ses gestes, la jeune fille enleva l'arme, nettoya au mieux la plaie et ramena l'animal jusqu'à la mer. Sans se préoccuper d'être habillée, elle se mit à nager avec lui pour l'attirer loin des côtes. Elle resta près de lui un moment, observant régulièrement la blessure qui finit par s'arrêter de saigner. Elle ne pouvait pas faire vraiment plus pour lui. Elle ne pouvait qu'espérer qu'il s'en sorte. Alors qu'elle allait le laisser, elle lui donna ce qu'elle n'avait jamais donné à personne, un sourire. Il était léger et fugace mais pourtant bien présent. Elle regagna ensuite la plage espérant que l'animal s'en sortirait dans le futur. Curieusement, elle sentait que ce serait le cas. Revenue sur l'île, elle reprit alors son entraînement comme si de rien n'était. Personne ne sut jamais ce qui s'était passé ce jour-là sur la plage, pas même Jonas.
Lorsqu’elle atteignit ses dix-sept ans, il la jugea apte à combattre pour obtenir son armure. Elle avait déjà affronté plusieurs adversaires et si, au départ, elle s’était faite mettre plusieurs raclées, depuis plus de trois ans, personne ne lui avait plus fait manger la poussière. Jonas la mit donc en lice pour l’armure d'Andromède. Agnès n’émit ni objection, ni enthousiasme. Elle voyait juste son but final se rapprocher d’elle. Les combats s’enchaînèrent les uns après les autres. La jolie jeune fille gagnait à chaque fois sans trop de difficultés, il fallait bien le reconnaître. Le dernier de ses adversaires, le plus puissant, fut un brin plus difficile à abattre. D’ailleurs le combat ne se termina qu’avec la mort de l’autre. C’est alors qu’on lui annonça avoir le droit de passer l'épreuve finale. En effet, pour obtenir l'armure d'Andromède, elle devrait passer l'épreuve du Sacrifice. Enchaînée aux rochers sacrificiels, elle devait se laisser submerger par la marée et survivre grâce à son cosmos. Se servant de son calme, elle se plongea dans la méditation et déclencha son cosmos. Sa force d'esprit et la puissance de son cosmos lui permirent de passer l'épreuve. Mais alors que l'épreuve se soldait par une victoire sans contestation possible une chose bien surprenante se produisit ou plutôt rien ne se produisit. L’armure ne sortit pas de sa box pour saluer sa nouvelle porteuse. Cela était on ne peut plus surprenant. Tout le monde s’en étonnait mais pour bien peu de temps. Une lumière aveuglante surgit du milieu de la mer et une armure sombre vint couvrir le corps de la jeune fille.
« Mais ce n'est pas une armure ?»
« Non, c'est une écaille ! Elle vient du Royaume sous-marin. »
« Mais c'est impossible ! C'est une combattante d'Athéna ! »
Contestations et étonnements fusaient de toutes parts même Jonas ne savait pas quoi dire. Que faisait donc cette écaille ici ? Agnès restait pourtant toujours aussi imperturbable bien qu'elle aussi soit totalement décontenancée. Elle ne disait rien. Pourtant, l'amure ou plutôt l'écaille qui la revêtait, semblait lui aller à la perfection. Ce n'était pas une question de taille, mais son cosmos, son moi profond, semblait être en parfaite harmonie avec l'écaille. Celle-ci semblait lui apporter une certaine paix intérieure, quelque chose qu'elle n'avait jamais ressentie jusque là. Les protestations fusaient toujours autour d'elle et laissèrent progressivement place à la colère.
« Trahison ! C'est un traître ! Elle fait parti des marinas ! »
« Ouais c'est une traître ! »
« Il faut la capturer et la ramener au Sanctuaire ! »
Pris par la colère, le doute et l'inédit de la situation, les esprits s'échauffaient et les corps se dirigèrent spontanément vers la nouvelle élue. Cette dernière ne bougeait toujours pas, observant la scène, presque en simple spectatrice. Jonas était perdu et ne savait que dire ou penser. Lui aussi fini par s'approcher mais dans le but de protéger sa disciple. Il était décontenancé par la tournure des événements mais savait qu'elle n'avait jamais joué double jeu et que, malgré son absence de réaction, elle devait aussi surprise qu'eux tous. Mais il n'eut guère le temps de lui venir en aide. Alors que les apprentis allaient se jeter sur elle, une vague énorme s'écrasa sur le groupe, les envoyant tous au tapis. Quand les jeunes gens et Jonas se relevèrent, Agnès avait disparu, emportée par la mer.
Chapitre 3 : Servir le dieu des Océans
Agnès perdit connaissance sous le choc de la vague et lorsqu'elle revint à elle, elle se trouvait dans un endroit inconnu. Elle recracha l'eau qu'elle avait avalé et se mit à genoux, essayant de comprendre ce qui s'était passé. Cela ne semblait pas vraiment avoir de sens. Elle regarda autour d'elle, histoire de voir où elle était tombée. Le sol semblait composé d'un mélange de sable et de terre, autour d'elle les buissons et arbres étaient remplacés par des gorgones et des coraux. L'endroit était magnifique mais un peu effrayant. Le silence régnait. Levant la tête, la jeune fille se rendit compte qu'en guise de ciel, c'était la mer qui se trouvait au-dessus de sa tête. Certains grands animaux marins étaient d'ailleurs visibles. Leurs silhouettes étaient comme autant de nuages aux formes atypiques. Pourtant, la demoiselle trouvait cela rassurant et même très beau.
« Bienvenue au Royaume sous-marin, marinas du Styx. »
La Française tourna la tête vers celui qui venait de lui adresser la parole. Un homme aux traits fins et aux magnifiques yeux bleus se trouvait à quelques mètres d'elle, un sourire rassurant aux lèvres. Il s'inclina.
« Je me nomme Gabriel Boyer, Français d'origine, comme toi et, accessoirement, le marinas de Perséis. Je suis ici pour te guider. J'imagine que tu dois être un peu perdu avec tout ce qui vient de se passer mais sache que ce n'est pas une erreur. Tu as toujours été destinée à servir Poséidon. Tu as d'ailleurs dû le sentir, ton cosmos est en parfaite harmonie avec l'écaille que tu portes. Tout comme tu t'es toujours sentie bien près de la mer. »
Effectivement, Agnès ne pouvait contredire le nouveau venu en ce qui concernait la mer et l'armure qu'elle portait. Elle se releva, restant cependant sur ses gardes. Elle ne fit aucun geste pour aller vers Gabriel mais celui-ci semblait savoir combien la jeune femme était du genre asociale. Il prit donc le parti de s'avancer.
« Le seigneur Poséidon t'a envoyé un test. Le dauphin. Tu aurais pu le tuer, tu as choisi de le sauver et même tu as prié pour lui. Une chose qui ne t'était pas arrivée avant. Ta place est parmi nous. Viens avec moi, je vais t'apprendre notre monde. »
Il lui tendit la main. Cela fit drôle à la demoiselle. Jonas avait eu le même geste quelques années plus tôt. Lui aussi avait voulu l'amener dans un autre monde. Pourtant, elle avait fait le choix presque par défaut. Là, elle ressentait une étrange impression comme si c'était bien là la voie à suivre et que là était véritablement sa place, dans ce monde de silence, sous les eaux. Elle prit donc la main tendue et se laissa guider.
Bien qu'ayant obtenu l'armure du Styx, elle avait encore beaucoup de choses à apprendre et notamment les règles qui régissaient ce nouvel endroit. Rapidement, elle maîtrisa ce nouveau lieu de vie, tout autant que les attaques et son armure. Il n'y avait plus à douter, elle était bien là où elle aurait toujours dû être. Douée pour passer inaperçue, elle commença à réaliser des missions de par le monde pour espionner les autres camps ou repérer de potentiels futurs marinas. Pour l'instant, elle ne fit pas le choix d'entraîner quelqu'un. Par contre, son caractère ne s'améliora pas pour autant. Elle restait toujours aussi froide, insensible et distante. [/justify]